Les dangers de la retraite par points.

 

C’est dans une France dévastée par quatre années de guerre, grâce à un rapport des forces favorable à la classe ouvrière, qu’a été construite notre sécurité sociale.

En 1945 le ministre communiste Ambroise Croizat met en place la Sécurité sociale en application du programme du Conseil National de la Résistance, lequel doit beaucoup à l’apport des communistes et de la CGT.

Sous la maîtrise d’œuvre d’Ambroise Croizat sont rassemblées des centaines de caisses patronales, syndicales, mutualistes avec pour objectif de créer un système unique qui rassemblerait à terme l’ensemble de la population.

Cette sécurité sociale comprend trois branches : la branche maladie, la branche vieillesse et la branche famille.

Il généralise les allocations familiales qui préexistaient en doublant la cotisation et en triplant les prestations.

La loi Croizat du 22 août 1946 établit une base mensuelle de calcul des allocations familiales égale à 225 fois le salaire horaire moyen d’un OS de la métallurgie de la région parisienne. Posant ainsi les allocations comme un élément du salaire qui reconnaît le travail de la famille en direction des enfants.

1946 Maurice Thorez crée le statut du fonctionnaire avec une pension de retraite égale à 75 % du salaire des six derniers mois.

1946 Marcel Paul crée EDF-GDF avec le statut des travailleurs de l’énergie et la retraite qu’il a appelée le salaire d’inactivité.

Et personne n’en est mort !

Cela pour faire remarquer qu’en France à partir de 1945-1946 la retraite a été instituée comme une prolongation du salaire et non pas comme la contrepartie de nos cotisations.

C’est cela que la droite et le patronat s’emploient à détruire notamment depuis le quinquennat à Sarkozy.

Jusqu’en 1991 le taux de remplacement, c’est-à-dire la première pension de retraite par rapport au dernier salaire été dans le privé de 84 % du dernier salaire. Au fil des différentes réformes, il est passé à 75 %.

En 1987 Philippe Seguin indexe les retraites sur les prix, jusque-là indexée sur la moyenne des salaires dans le privé. Ce qui déconnecte les salaires des pensions.

Aujourd’hui Macron accélère la casse.

Il veut introduire la retraite à points détruisant ainsi le lien entre salaire d’activité et la pension de retraite. Il détruit aussi la solidarité entre les salariés en activité et les salariés retraités.

En mars 2016, François Fillon, devant un aréopage de patrons, expliquait crûment ce qu’est la retraite à points :

« La retraite par points ça permet de baisser chaque année la valeur des points et donc de diminuer le niveau des pensions ».

On ne peut être plus clair !

Le modèle suédois mis en place depuis 1998 sert de référence.

Dans ce système chaque salarié se voit affecter un compte dans lequel sont comptabilisées toutes les cotisations.

Il n’y a plus d’âge légal de départ.

Lorsque le salarié liquide sa pension, on divise le compte, dit virtuel ou notionnel, par l’espérance de vie de la cohorte à laquelle il appartient (si cette année-là, on a à 60 ans, par exemple) s’ils ont en moyenne 23 ans d’espérance de vie, on divise le montant du compte par 23 pour obtenir la rente annuelle.

Ainsi, toute hausse de l’espérance de vie pousse les intéressés à retarder la liquidation de leur pension pour en conserver le montant.

L’objectif est que la somme des pensions soit strictement proportionnelle à la somme des cotisations. Comme on peut le constater, nous ne sommes plus dans la logique de la continuation des salaires.

En France en 2018 plus de 400 000 retraités travaillaient pour subvenir au minimum de leurs besoins.

Avec la réforme Macron cette situation risque de se généraliser si nous ne la mettons pas en échec.

L’intérêt des salariés.

Poursuivre et développer l’œuvre entreprise par Croizat à la libération.

La bourgeoisie française et ses représentants au gouvernement posent toujours la question du financement, du « combien ça coûte », surtout quand il s’agit des salariés.

Les bâtisseurs de la sécurité sociale se sont surtout posés la question de quoi avons-nous besoin. Et comme disait le général De Gaulle : « L’intendance suivra », cela ne concernait pas la sécurité sociale, bien sûr !

Mais parlons tout de même financement.

Du fait de la politique dite de « modération salariale » mise en œuvre au début des années 1980, la part des salaires dans la valeur ajoutée a baissé de 10 points.

En 2019 le PIB (Produit Intérieur Brut, ensemble des richesses produites) s’établit à 2425 milliards d’euros. Donc 10 points de PIB c’est 242 milliards € de plus pour les salaires dont 96 milliards € pour les 3 branches de la sécu. (pour un déficit annoncé toutes branches confondues de 1,7 milliards € en 2019 et prévisionnel 2020 de 50,7 milliards €).
(source Loi de Financement de la Sécurité sociale 2021)

Voilà une piste pour un gouvernement qui dit qu’il va manquer 17 milliards en 2025 ou en 2040… ils ne savent pas au juste, pour les retraites.

Si l’on excepte les conséquences de la crise sanitaire (2020 - 2021) les richesses n’ont cessé de croître depuis 1950.

En milliards valeur 2014,
de 1950 à 2018

1.  le PIB est passé de 293,4 à 2285,9. Il a été multiplié par 7,79.

2.  Dans le même temps la population de France est passée de 41 647 258 à 64 737 769 habitants. Elle a été multipliée par 1,55.

En milliards valeur 2010

En 1960 le PIB était de 451,9 milliards €.

La protection sociale représentait 15 % de ce PIB soit 68 milliards d’euros.

Il restait donc : 451,9 - 68 = 383,9 milliards d’euros.

En 2016 le PIB était de 2228,9 milliards d’euros.

La protection sociale représentait 33 % de ce PIB soit 735 milliards d’euros.

Il reste donc 2228,9 – 735 = 1493,9 milliards d’euros.

Nous avons donc aujourd’hui plus de moyens pour financer l’ensemble de la protection sociale.

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Avec la retraite à points et son adossement à la capitalisation boursière.

CAC 40 : LA BOURSE REPLONGE ET PERD DÉSORMAIS PRÈS DE 10% EN UNE SEMAINE

BFM Bourse : jeudi 27 février 2020 à 10h10

 

On peut imaginer les conséquences sur les pensions de retraite

 

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La fiscalisation de la sécurité sociale, sans garantir de quelque manière la suppression du déficit, légitime le système capitaliste, alors même que la cotisation sociale tout en ayant prouvé qu’elle pouvait assumer des engagements massifs et de long terme, est au contraire, subversive de ce système.

La généralisation et l’assouplissement de l’accès à la sécurité sociale, y compris auprès des non-cotisants entre 1945 et 1980, prouve l’absurdité de penser la prestation comme un différé de ressources, une sorte d’épargne qui justifierait des versements proportionnels ou de durée de cotisations antérieures, des hausses de durée de cotisation pour une pension à taux plein (ou des reculs d’âge de retraite, ce qui revient au même) ou de recevoir des soins à proportion de la durée de cotisations antérieures.

Bernard FRIOT

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